7 habitudes pour être productif

Arnaud Weiss
17 Août 2021

Je suis généralement très sceptique vis-à-vis de la littérature de self-development américaine. La plupart des ouvrages enfoncent des portes ouvertes ou se contentent de recycler des concepts déjà existants. Certains d’entre eux sont néanmoins des pépites. Soit parce qu’ils proposent une approche innovante (Ex : Never Split the Difference), ou bien parce qu’ils résument bien l’état de l’art dans un domaine (Ex : The charisma myth).

Dans un précédent article, je faisais la synthèse des deux ouvrages phares sur les habitudes. Ils nous éclairent sur l’impact colossal de nos routines, qui constituent 40% de nos actions. Les auteurs nous donnent également les clefs pour changer nos mauvaises habitudes et en construire de nouvelles.

Mais une question subsiste après ces deux lectures : quelles habitudes doit-on introduire dans notre quotidien ? C’est la question à laquelle répond cette série d’articles. Pour commencer, je me suis replongé dans un classique : The 7 habits of highly effective people de Stephen R. Covey. Vendu à 30 millions d’exemplaires et livre audio le plus écouté aux Etats-Unis, ce livre a largement inspiré les théories managériales modernes.

Dans cet article, découvrez les trois premières habitudes de Covey :

- Être proactif et non réactif

- Définir sa constitution personnelle

- Prioriser avec la matrice urgent / important

Habitude 1 : être proactif


Devenu un concept classique dans la littérature managériale, que signifie la proactivité ? L’académie française nous donne une définition efficace :

“Le terme de proactivité qualifie une personne qui prend sa vie en main et refuse de se laisser diriger par les évènements extérieurs”.

Pour Stephen R. Covey, le premier pas vers la proactivité est de toujours prendre pleine responsabilité face à une situation donnée. C'est-à-dire refuser de blâmer les autres, les circonstances, ou de se trouver des excuses. Nous sommes seuls responsables de nos échecs dont il faut tirer des enseignements, mais aussi de nos réussites.

Une illustration à travers le langage de ce changement de paradigme, tirée du livre


Le deuxième pas vers la proactivité est la maturité émotionnelle. D’après Stephen R. Covey, la proactivité consiste aussi à choisir sa réaction aux événements, bons ou mauvais. Il cite Eleanor Roosevelt à cet effet : “Personne ne peut vous blesser sans votre consentement”.

Face à un revers professionnel ou un échec personnel, l’idée est donc non seulement de prendre l’entière responsabilité pour cette situation mais aussi de choisir sa réaction émotionnelle. Plutôt que de se sentir mécaniquement mal, d’être réactif, il convient donc de maîtriser sa réponse. Cette idée n’est pas nouvelle. C’est la pierre angulaire de la philosophie stoïcienne, fondée au début du IIIe siècle av. J.-C. à Athènes. Elle consiste à “accepter le moment tel qu'il se présente, à ne pas se laisser contrôler par le désir du plaisir ni la peur de la douleur, à utiliser son esprit pour comprendre le monde et à faire sa part dans le plan de la nature, à œuvrer avec les autres et à les traiter de manière juste et équitable.” Les auteurs stoïciens comme Sénèque, Epictète ou Marc-Aurèle ont profondément marqué mon développement intellectuel et je ne peux que vous inviter à lire leurs œuvres.

Le troisième pas vers la proactivité est de prendre des initiatives pour atteindre nos objectifs. “Je suis le seul capitaine de mon navire”. Vous ne deviendrez pas un brillant musicien, un grand sportif, un cadre dirigeant accompli, en vous laissant bercer par le cours des choses. Réussir implique de sortir de sa zone de confort. Dans The Black Swan, le statisticien et ancien trader Nicholas Taleb explique que nos vies sont fortement impactées par l’imprévisible. Il convient alors de créer un maximum de situations dans lesquelles des opportunités inattendues peuvent apparaître. Il faut provoquer la chance en quelque sorte !

La phrase de Donald Trump qui a fait scandale. On attend d'un leader qu'il soit proactif

En synthèse, la proactivité consiste donc à se tenir comme unique responsable de sa situation, choisir son état émotionnel indépendamment des circonstances, et refuser la passivité en prenant des initiatives pour atteindre ses objectifs.

Habitude 2 : Définir sa constitution personnelle et s’y référer constamment

Pour Comey, il est important de formaliser deux éléments :

- Les principes qui doivent guider nos actions (ex : ne jamais mentir)

- Nos objectifs personnels et professionnels (ex : devenir enseignant à l’université)


Ils sont les deux composantes d’un puissant moteur pour guider nos actions et forger notre caractère. C’est une boussole qui nous montre le nord à tout instant. Cette section du livre a inspiré le célèbre “Start with the why” - "Commencez par le pourquoi" - de Simon Sinek (lien).

L’auteur propose un outil pour formaliser ses principes et ses objectifs : écrire sa constitution personnelle (mission statement). Cette dernière synthétise ce que vous voulez être (vos principes qui constituent votre caractère) et faire (vos objectifs, vos contributions au monde). Cela fait plusieurs années que je me livre à l’exercice, voici un extrait de ma constitution personnelle que j’actualise tous les ans :

Si vous avez du mal à définir votre constitution personnelle, Covey propose l’expérience de pensée suivante. Fermez les yeux et imaginez votre enterrement de la manière la plus réaliste possible. Vos proches prennent la parole. Quelles qualités, quels accomplissements aimeriez-vous qu’ils soulignent à cette occasion ?

Concernant les objectifs, un large consensus scientifique (lien) soutient leur importance pour réussir et être heureux. Sans eux, il est facile de se laisser emporter par le tumulte du quotidien. Les objectifs permettent :

- De se motiver

- De définir clairement des étapes et actions pour atteindre sa cible

- De mesurer son progrès

Pour Covey, le principe de constitution personnelle doit également s’appliquer à l’échelle d’une organisation. Cette pratique marque la différence entre le leadership et le management. Le management se focalise sur le comment, sur l’opérationnel. Le leadership, à l’inverse, se concentre sur la vision macro et sur le pourquoi.

La deuxième habitude consiste donc à formaliser ses principes ainsi que ses objectifs de vie et s’y référer sans cesse comme à une boussole.

Habitude 3 : prioriser efficacement

Une fois que nous disposons d’un cap inébranlable, comment atteindre ses ambitions ? Pour Comey, la discipline personnelle est au cœur de notre succès. Cette discipline sous-tend d’apprendre à prioriser ses tâches, et accomplir celles qui sont critiques en premier, même si on ne les aime pas.

Dans l'ouvrage The common denominator of success, Albert E. M. Gray étudie les dénominateurs communs des personnes qui réussissent dans leur domaine. Sa conclusion peut se résumer en une phrase :

“Les personnes qui réussissent ont pour habitude de faire les tâches déplaisantes que ceux qui échouent se refusent à faire. Leur déplaisir est subordonné par leur discipline à leur désir d’atteindre leur objectif."

Il y a pour Comey trois stades d’organisation qui amènent à des niveaux d’efficacité différents

- Le niveau 0, la to do list

- La to do list qui intègre une notion temporelle. Une durée d’exécution est attribuée à chaque tâche.

- Une matrice urgent / important. Elle seule permet de prioriser correctement

La matrice d'Eisenhower, une version améliorée de celle de Comey.  Elle est largement utilisée aujourd’hui encore dans le conseil en stratégie.

L’auteur nous invite à ne pas assigner plus d’un quart de notre temps aux tâches urgentes et importantes, et les trois quarts restants à celles qui sont uniquement importantes. L’idée sous-jacente est de gérer son niveau de stress et de dédier l’essentiel de son temps aux chantiers stratégiques.

Autres bonnes pratiques suggérées par Comey pour prioriser efficacement :

- Préparer et planifier proactivement sa semaine pour s’assurer de dédier suffisamment d’énergie aux chantiers critiques pour notre succès.

- En fin de semaine, mesurer rétrospectivement le temps passé sur les différents chantiers. Quels ont été les résultats ?

- Déléguer. C’est difficile au début, mais essentiel pour pouvoir faire grandir une équipe et se concentrer sur les tâches où nous avons le plus d’impact.

Note : j'aide mon équipe à appliquer ce principe de Comey en leur demandant quelles sont les 3 tâches critiques qu'ils souhaitent accomplir d'ici la fin de la semaine

J’espère que la première partie de cet article vous a plu. Dans le prochain opus, je détaillerai les quatre autres habitudes (la dernière va vous étonner !) de Comey.

Références

https://hbr.org/2019/03/what-makes-some-people-more-productive-than-others

The autobiography, Benjamin Franklin (1791), en accès libre ici grâce au Nuremberg Project

https://www.academie-francaise.fr/proactif

https://www.ted.com/talks/simon_sinek_how_great_leaders_inspire_action?language=en

Fondements de la métaphysique des mœurs - Emmanuel Kant (lien)

The Black Swan: The Impact of the Highly Improbable (2010) - Nassim Nicholas Taleb (lien)

The Neuroscience of Goals and Behavior Change - Elliot T. Berkman - 2019 (lien)

https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25251491