5 règles pour un feedback efficace

Arnaud Weiss
25 Février 2021

Le feedback brut et focalisé sur les faiblesses ne marche pas

Radical Candor fait partie des cinq ouvrages les plus cités dans l’écosystème startup. Kim Scott soutient que le feedback doit être franc et brutal, tout en ayant à cœur sincèrement le bien-être des collaborateurs. Beaucoup de dirigeants ont interprété l’ouvrage comme une justification à la brutalité dans leurs rapports à leurs équipes.

La "radical candor" se situe au croisement de la bienveillance et du challenge direct d'après Kim Scott

Tout d’abord, rappelons quel est le but du feedback. Sa finalité est de faire grandir et exceller ses collaborateurs en leur partageant des retours sur leur travail. Au regard de cet objectif, l’approche brute de décoffrage prônée par Kim Scott est-elle la bonne ? Un excellent article académique de la Harvard Business Review explique pourquoi c’est un non-sens scientifique :

- Les neurosciences ont démontré que la critique provoque dans le cerveau un effet "fight or flight" qui paralyse l'apprentissage. A l'inverse, les commentaires positifs le stimulent en activant le système nerveux parasympathique.

- Les réseaux de neurones se développent plus vite et plus profondément dans les zones du cerveau déjà denses. Il est donc plus efficace de se focaliser sur le développement des forces d'une personne plutôt que la correction de ses faiblesses.

- Les évaluations que nous faisons des autres sont biaisées par notre propre niveau d'expertise et souvent profondément erronées. Plus de 50% de notre notation d'une compétence d'une personne est en réalité le reflet de notre propre niveau. Ce phénomène est appelé "idiosyncratic rater effect" et est résilient (aucune formation ne peut le diminuer).

La conclusion des auteurs de l’article de l’HBR est donc que le feedback négatif est souvent inexact et inefficace pour faire grandir ses collaborateurs. Ils donnent également plusieurs pistes pour en formuler, que je synthétise dans la section suivante en plus de mes propres analyses.

Les 5 règles d’or pour donner du feedback qui fait grandir

1. Demandez à chaque membre de votre équipe comment ils préfèrent recevoir leur feedback lors de votre premier échange avec eux.

2. Ne donnez pas de feedback à chaud. Il risque d’être mal formulé et inexact comme vous manquez de recul. Notez le pour votre prochain entretien individuel. Mieux vaut observer plusieurs situations pour s’assurer que c’est systématique.


3. Quand vous donnez du feedback, commencez par demander à votre collaborateur ce qu’il a bien fait et ce qu’il pourrait mieux faire. Il le sait probablement mieux que vous. L’essentiel du travail d’un manager s’apparente à de la maïeutique. Ecoutez et posez les bonnes questions.

The point of feedback is to explore the nature of excellence for an individual. We’re so close to our own performance that it’s hard to get perspective on it and see its patterns and components (Harvard Business Review)

4. Investissez du temps pour bien qualifier les forces et compétences de vos collaborateur. Donner des exemples concrets de situations, suggérez des actions pour les renforcer. Enoncez des points positifs génériques, sans effort sincère, pour préparer à la critique ("shit sandwich") a des effets terribles. Faites un vrai effort.


5. Limitez votre feedback “négatif” à une observation objective et structurée de ce qui pourrait être mieux fait dans un processus métier. Evitez les jugements creux et non actionnables comme “tu manques d’assurance dans tes RDV commerciaux”. Utilisez le modèle McKinsey.

En conclusion, si vous voulez sincèrement aider vos collaborateurs à grandir et exceller dans leur domaine, aidez-les à identifier leurs forces et à trouver des leviers pour les développer. Le feedback négatif doit être structuré et se limiter à l’observation objective des résultats de certaines actions.


Références

The Feedback Fallacy, Harvard Business Review, Marcus Buckingham and Ashley Goodall.